LES RACINES DES YARDBIRDS  
 

Sonny Boy Williamson I
Jimmy Reed
Bo Diddley
Chuck Berry
Eddie Boyd
Billy Boy Arnold
Ernie K-Doe
John Lee Hooker
Slim Harpo
Howlin' Wolf
Sonny Boy Williamson II
The Shirelles
Jake Holmes
Garnet Mimms

 

Tout au long de leur existence les Yardbirds furent de grands admirateurs de la musique noire et des bluesmen en particulier. Une bonne partie du répertoire de l'époque Eric Clapton notamment, est puisé directement auprès des artistes noirs. Si cela permit aux Yardbirds de se forger un style innovateur, l'ascenseur fut renvoyé vers les créateurs en leur permettant de sortir d'une relative obscurité et conquérir un public blanc. C'est surtout l'Angleterre qui fit oeuvre de pionnier dans cette démarche. Des noms comme Alexis Korner, Cyril Davies, Rolling Stones, John Mayall, sont irrémédiablement assosciés au mouvement. Mais quels furent ces artistes qui surent capter l'oreille des Yardbirds et le coeur de leurs fans?
C'est ce que nous allons voir...

  JOHN LEE "SONNY BOY" WILLIAMSON (1914-1948)
GOOD MORNING LITTLE SCHOOLGIRL
Deux des plus grands pionniers harmonicistes du blues ont presque le même nom. Le plus célèbre des deux, Sonny Boy Williamson II croisera plus tard la route des Yardbirds de belle manière. Celui qui nous intéresse ici est moins connu, mais se différencie de l'autre par l'appellation I ou John Lee. Sur le second simple des Yardbirds et sur l'album "Five Live" figure "Good Morning Little Schoolgirl", titre enregistré par Williamson en 1937. C'est sans doute la plus vieille chanson en âge que les Yardbirds mirent dans leur répertoire.
John Lee Williamson est né à Jackson, Tennessee en 1914. Intéressé par la musique dès son plus jeune âge, il apprend l'harmonica qui va devenir l'instrument de sa notoriété. Après avoir erré un peu partout en jouant avec des musiciens de rencontre, il finit par atterrir à Chicago, ville migratoire pour les noirs du sud à la recherche d'emplois. Grâce à cette communauté, toute la région va devenir par la suite un des hauts lieux de la musique noire aux USA. Par opposition à celui du Mississipi, rural et traditionnel, le blues de Chicago deviendra urbain et électrique. Pour l'instant, les noirs constituent un sous-prolétariat qui vit avec sa culture. Un sous label de RCA Victor, Bluebird, édite à l'intention de ce public de la musique typiquement noire. Remarqué par l'homme qui tire les ficelles de ce label, Lester Melrose, Williamson est engagé. Son premier enregistrement est justement le titre qui nous intéresse, un composition originale qui va le propulser dans le vedettariat. S'il tient l'harmonica, le guitare est l'affaire de Big Joe Williams, un autre grand nom du blues. Au fil des ans son style va s'affirmer tout au long de la centaine et plus de titres qu'il enregistrera pour Bluebird. Il finira prématurément sa carrière en 1948, dans des circonstances mystérieuses. Reputé pour avoir le vin mauvais, il est battu à mort, victime d'une agression ou d'un réglement de compte.
Malgré cela, il reste une des grandes figures et un authentique pionnier de l'harmonica, amplifié ou non. En 1990, sa ville natale où il est enterré, lui rendit un vibrant hommage devant des centaines de personnes.
       
JIMMY REED (1925-1976)
BABY WHAT'S WRONG
I AIN'T GOT YOU
LIKE JIMMY REED AGAIN
   

Jimmy Reed est une mine d'inspiration pour nombre de musiciens qui eurent une fois ou l'autre l'intention d'approcher le blues dans leur style musical. Nombre de ses titres sont extrêmement populaires et les plus grands noms, Elvis Presley le premier, ne se gênèrent pas pour visiter son répertoire. Lors de l'éclosion des groupes anglais tendance rhythm and blues, les Rolling Stones (Honest I Do), les Pretty Things (Bright Lights Big City, Big Boss Man) Downliners Sect, Yardbirds (Baby What's Wrong), ces artistes se mirent à visiter son répertoire. Les Yardbirds furent bien sûr au nombre en reprenant dans une des premières sessions "Baby's What's Wrong et "I Ain't Got You" sur le deuxième simple. Un troisième titre, le bien nommé "Like Jimmy Reed Again", parle de lui-même.
Jimmy Reed est né en 1925 dans le Mississipi. Il apprend la guitare et l'harmonica et émigre vers Chicago pendant la seconde guerre mondiale. Après un séjour à l'armée, il revient dans cette ville et renoue avec de vieux complices musicaux comme Eddie Taylor, qui deviendra un fidéle de sa bande. En 1953, il décroche un contrat avec Vee Jay records. Son blues électrique ravira autant les blancs que les noirs, dès que ses premiers disques sont publiés. Un nombre important de ses titres connaîtront un succès considérable dont " Ain't That Loving You Baby" "Big Boss Man" (les deux repris par Presley), "Baby What You Want Me to Do", " Shame Shame Shame".
A partir du milieu des sixties, si son influence ne se dément pas, sa santé précaire qu'il soigne avec le goulot de la bouteille, l'oblige à mettre sa carrière en veilleuse. Il meurt en 1976 en Californie des suites de complications respiratoires.
Du point de vue strictement musical, Jimmy Reed reste un des grands maîtres du blues urbain de Chicago. Il ne fait pas de doute que son répertoire sera revisité par les générations futures.

   
BO DIDDLEY ( 1928-2008)

YOU CAN'T JUDGE A BOOK BY LOOKING AT THE COVER
WHO DO YOU LOVE
PRETTY GIRL
I'M A MAN
HERE 'TIS


C'est le chanteur que les Yardbirds ont le plus repris, au total 5 chansons, dans la période avec Eric Clapton. Disons le tout de suite, ils ne furent pas les seuls. Les Rolling Stones, les Animals et des centaines d'autres ont un jour interprété du Bo Diddley. Si certains ne reprennent pas directement ses chansons, ils s'inspirent de son rythme basique, que l'on a souvent comparé à un tam tam dans la jungle, nommé "jungle beat". Des dizaines de titres de sa discographie sont repris par d'autres artistes. Les plus habiles en firent même des succès personnels ou des titres qui entreront dans la légende via leur interprétation. Les Yardbirds firent un coup de maître avec leur reprise de "I'm A Man", dans la seconde version, celle qui ne figure pas sur le premier album en live. Ils se rendirent compte que ce titre était destiné "à faire du bruit", chose qu'ils mirent en pratique justement dans les studios Chess, où fut créé l'original. Le talent grandissant de Jeff Beck leur permit cette réussite, qui elle-même inspira toute une génération d'imitateurs.
Bo Diddley, Ellas Bates, dit Ellas Mc Daniel est né dans le Mississipi à Mc Comb en 1928. Sa famille adoptive émigre à Chicago. Il s'initie à la musique en jouant du violon avec une certaine maestria. Il tâte un peu de la guitare, mais s'intéresse aussi à la batterie. Moins doué pour cet instrument que pour les autres, un peu frustré, il adopte finalement la guitare, mais avoue jouer de la guitare en pensant à la batterie. Au cours du début des années 50, il joue principalement dans la rue et les clubs. Il rencontre un certain Jerome Green, qui va devenir le joueur de maracas sur nombre de ses disques. Un autre personnage, Billy Boy Arnold, un autre source d'inspiration pour les Yardbirds (voir plus loin), complète la bande avec son harmonica. Après quelques tentatives infructueuses, le label des frère Chess à Chicago accepte de lui donner sa chance. Son premier disque "Bo Diddley / I'm A Man" devient rapidement un succès. Ce disque pose la base de son style et de sa personnalité. Souvent il mettra son nom d'artiste en chansons sous différents titres. La forme de ses guitares, souvent rectangulaires, est une autre manière de se démarquer des autres musiciens. La liste de ses succès est aussi une référence de toute l'importance qu'il a eu dans la musique, "Roadrunner", "Mona", "Pretty Thing", "Who Do You Love", Diddley Daddy", "I Can Tell", pour n'en citer que quelques uns. Il doit autant gagner d'argent avec la vente de ses disques qu'avec les droits d'auteur de ses chansons, qu'il signe Ellas Mc Daniel et dont les reprises se comptent par centaines.
Sa longue carrière, sa contribution à la musique, en font un des monuments les plus visités depuis les années 50. Peut-être encore plus par le public blanc qui semble l'aduler plus spécialement